(copié-collé d'un mail - ouaiis, un blog, c'est fait pour donner son avis)Bonjour à tous,
Je n'ai pas l'habitude des coups de gueule collectifs, des infos que je demande de faire diffuser, etc, mais bon, aux grandes fins, les grands moyens.
Voilà, comme vous le savez peut-être (peut-être, parce que quand je vois la place que nous accordent les journaux, ça fait peur), depuis plusieurs semaines, les étudiants se mobilisent contre la Loi dite Pécresse, la loi LRU (Loi relative aux libertés et responsabilités des universités). A coups d'AGs, de manifestations, de blocages, d'actions "coup-de-poing", nous montrons notre désaccord, contre une loi qui privatisera l'université et permettra à l'Etat de s'en désengager, qui en fera un lieu professionalisant, alors que nos profs se défendent que l'université est un endroit où l'on apprend à devenir "humain et citoyen", avant d'apprendre à produire et à faire du bénéfice. Une loi qui rendra le statut des personnels plus précaire, qui fera du CA un rassemblement de gens avec plus de la moitié de ces personnes qui seraient extérieures à l'université, qui donnera les quasi plein pouvoirs au président, une loi qui précarisera, voire fera disparaître certaines filières (musicologie, anthropo, lettres classiques... ce qui n'est pas rentable)...
Les discussions avec les personnes étrangères font peur. Une prof d'anglais nous expliquait que depuis qu'une telle loi est passée, une centaine d'université a déposé bilan. Une étudiante italienne est venue étudier en France parce que chez elle, la filière qui l'intéresse - anthropologie - n'existe plus. Un étudiant autrichien nous explique qu'en France au moins, il peut se payer les frais d'inscription.
Comme moyen d'action, de nombreuses universités ont choisi le blocage. Qu'on soit pour ou contre cette "solution" - qui a ses pour et ses contre (si si), c'est en tout cas la seule (ou le seul semblant de solution) que possèdent les étudiants. Le débat sur le blocage n'a pas besoin d'être évoqué là, (à moins que vous ne le souhaitiez, je suis toujours prête à argumenter ^^), car il rend la discussion souvent stérile, divise les étudiants, et empêche d'avancer.
Ici, je veux vous parler du cas de l'Université Lyon2, où je fais mes études. Je veux vous parler de Lyon2, parce que c'est ma fac, que je la connais, que j'y suis tous les jours ou presque depuis le début du mouvement, puisqu'il est impossible d'obtenir des informations autrement. Parce que les media ont décidé de nous ignorer, que les journalistes nous expliquent qu'ils craignent pour leur poste si jamais ils disent la réalité des choses (véridique !), parce que le gouvernement a décidé de tout faire passer en force sans réaliser qu'il se met de plus en plus de gens à dos, parce que.
Et puis parce que je suis fatiguée de lire dans les journaux des informations complètement erronées, fatiguée de voir qu'on nous fait passer pour des terroristes, des glandeurs (on a ENVIE de retourner en cours, je suis en double licence, je bosse dans les salles informatique de ma fac, c'est-à-dire que je ne suis pas payée quand elles sont fermées, et ça ne m'arrange pas vraiment, en fait...), des gauchistes-fascistes, et pour tout ce qu'on veut, sauf pour ceux que nous sommes réellement. Des étudiants en colère, et souvent conscients de la nécessité d'une réforme de l'Université, mais surtout pas - surtout pas, celle qui nous est proposée. Des étudiants qui refusent de se taire (comme on nous l'a souvent reproché) sous prétexte que ce gouvernement a été élu démocratiquement - et alors ? c'est pour ça que je vais devoir fermer ma gueule pendant cinq ans ? hors de question...
Bref. Le problème qui se pose à Lyon2 aujourd'hui, c'est le conflit étudiants-équipe présidentielle. En effet, depuis le début, l'équipe présidentielle a déjà : fait intervenir les CRS le premier soir d'occupation du campus des Quais (ie. au tout début : commentaires à la télé quand on voit les étudiants sortir entre deux cordons de CRS, "le mouvement étudiant se calme...", laissez-moi rire), saccagé des locaux associatifs et syndicaux sous divers prétextes qui s'annulaient les uns après les autres, "hygiène", "sécurité", "désamiantage", fermé administrativement la fac empêchant ainsi l'accès aux bibliothèques, ce que les bloqueurs refusaient de faire, organisé un vote électronique parce que c'est fun de voter de chez soi, pas besoin de se bouger, pas besoin de venir voir ce qui se passe, pas besoin de chercher à comprendre, et puis c'est impossible de frauder hein, si y'a un huissier qui vérifie à la sortie - sauf qu'un huissier n'est pas informaticien, et que quelqu'un qui s'y connaît un peu peut très bien voter quatre fois si ça lui chante,
organisé un vote à bulletin secret ALORS QUE CA AVAIT ETE VOTE EN AG. Suite à ça, des étudiants ANTI-bloqueurs ont rencontré le président pour discuter avec lui de l'organisation de ce vote, décidé en AG. Les modalités votées en AG ont été refusées par le président. Les étudiants bloqueurs et anti-bloqueurs ont donc appelé au boycott du vote.
Résultat, 15% de participation. Il serait facile de dire que 85% ont donc boycotté le vote. Trop facile. Mais admettons que la moitié de ces 85% ont boycotté, cela fait encore plus de 40% qui n'ont pas pris la peine de se bouger jusqu'à la fac pour mettre un papier dans l'urne. 40% qui n'en a strictement rien à faire. Alors après, comment dire que les AG ne sont pas démocratiques parce que tout le monde ne peut pas y assister ? Les gens qui VEULENT y assister, vraiment (à part ceux qui travaillent, etc.) peuvent. Parce que les autres jours, ils viennent bien en cours. Ils peuvent donc venir en AG.
Ils peuvent venir en AG. Encore faudrait-il que la présidence nous accorde le droit de réunion, comme il ne l'a pas fait lundi dernier. Deux AG étaient organisées sur les deux campus de la fac, même jour que leur vote, ces AG devaient se clôturaient par un vote à bulletin secret sur la suite du mouvement. Pour empêcher une AG, rien de plus simple, fermez administrativement la fac, les locaux, les amphis, et faites mine de rien entendre/voir quand 1500 étudiants viennent devant le lieu d'organisation de votre vote à bulletin secret pour demander une salle.
Sur l'un des deux campus, une AG a tout de même pu se tenir, dans un amphi miraculeusement ouvert (et non pas sur ordre de la présidence, hein), et a voté la poursuite du blocage à 72%. Résultat, le lendemain, blocage. Et c'est là que les CRS interviennent. Matraquent. C'est là que certains anti-bloqueurs sont choqués, que des profs refusent de faire cours dans de pareilles conditions et exercent leur droit de retrait. Le lendemain, même scénario. Le surlendemain.
Sur l'autre campus, il faut montrer patte blanche pour entrer à la fac, et mercredi matin, quand je m'étonne de voir 9 cars de CRS le long des quais, et que je demande ce qui s'est passé, "oh mais rien mlle, c'est pour votre sécurité". Merci bien, ça me touche. Une AG a finalement pu réunir 300 étudiants, vote du blocage également, CRS à nouveau. Deux arrestations arbitraires, un étudiant avec 4 points de suture. Les vidéos sont là :
http://fr.youtube.com/watch?v=M4Tmsx7aVLghttp://fr.youtube.com/watch?v=V5wLyQZHWCOEt Journès, le président, derrière la grille, à regarder. Et les media absents, ou bien arrivant après la bataille, quand les bloqueurs accusent les étudiants qui entrent dans les bâtiments entre deux cordons de CRS de ne pas avoir de conscience. Hier, manifestation. Un journaliste s'approche d'un couple d'une cinquantaine d'années, en tendant son micro, "vous, vous n'êtes pas mobilisés n'est-ce pas ?", "non", et "y'en a marre, hein, y'en a marre ?". Mais nom d'un zou, qu'est-ce que c'est que cette question ?!!
Quelle éthique là-dedans ? Quelle indépendance d'esprit ?
Ce matin, au lieu de nous faire le partiel prévu, un professeur nous expliquait qu'il ne fallait en aucun croire les communiqués que la présidence s'obstine à nous envoyer, et que cette même présidence était en train d'attaquer les profs sur la non validité de leur droit de retrait, car il n'y aurait pas de danger imminent. Pas de danger imminent ?
...
Je sens que je m'emballe un peu, je ne sais pas ce qui m'énerve le plus. Le silence radio qui est fait sur ce mouvement, la multiplication des conneries de la présidence, l'indifférence de notre gouvernement, la division des étudiants, ou. J'en sais rien.
Voilà, je ne sais pas à quoi ça sert de vous envoyer un mail comme ça, peut-être si vous vouliez bien le faire suivre, si vous vous sentez concernés, pour essayer d'informer de ce qui se passe. Comme les moyens "officiels" ne le font pas, eux, on va changer de stratégie. Merci, merci, merci et désolée d'avoir été aussi longue et à fleur de nerfs...
ps : plus d'infos, vidéos, rdv, etc, là :
http://rebellyon.info